Alors que le récent décret du 27 novembre 2020 modifie encore la procédure civile, notamment le formalisme de la déclaration d’appel, la Cour de cassation a précédemment rappelé dans un arrêt du 17 septembre 2020 les conditions d’admission des demandes nouvelles formées en appel.
La lecture de cet arrêt permet de se rassurer (un peu) en ces temps procéduraux aussi agités que complexes.

 

Par Jérôme Wedrychowski

 

 

La 2ème Chambre civile de la Cour de Cassation a rendu le 17 septembre 2020 un arrêt (N°19-17.449) qui devrait intéresser tout appelant et surtout leur avocat !

 

La Cour de cassation rappelle que les parties ne peuvent soumettre à la cour d’appel de nouvelles prétentions, à peine d’irrecevabilité relevée d’office (Art. 564 CPC).

 

Mais … la Cour précise que « toutefois, elles peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire » (Art. 566 CPC).

 

Dans le cas d’espèce, l’appelant avait souscrit un prêt immobilier auprès d’une banque en 1999.

 

Deux avenants à ce prêt avaient été signés par les parties dans les années qui suivirent (2010 et 2012).

 

Ultérieurement, l’emprunteur a soutenu que le taux effectif global du prêt (TEG) était erroné et a poursuivi la banque devant le TGI en 2014 (devenu TJ désormais) pour voir condamner la Banque à substituer le taux d’intérêt légal au taux d’intérêt conventionnel depuis la souscription du contrat de prêt.

 

Le jugement de 1ère instance avait déclaré ces demandes prescrites et l’emprunteur éconduit avait relevé appel de cette décision en soutenant que sa demande n’était pas prescrite en ce qui concernait les avenants.

 

La Cour d’appel de Chambéry déclara irrecevables comme nouvelles les demandes relatives aux avenants, en retenant que l’appelant critiquait pour la première fois devant la cour d’appel le taux d’intérêt porté sur ces avenants.

 

Au visa des articles 564 à 567 du code de procédure civile, la Cour de cassation censure cette décision et répond en 3 points, suivant sa nouvelle et appréciable écriture des arrêts :

 


 

7.    La cour d’appel est tenue d’examiner au regard de chacune des exceptions prévues aux textes susvisés si la demande est nouvelle. Il résulte de l’article 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour d’appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles ci soient l’accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.

 

8.    Pour déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes relatives aux avenants de 2010 et 2012, l’arrêt retient que ces demandes n’ont jamais été formées en première instance et ne tendent pas aux mêmes fins, la nature des prêts étant différente et les demandes présentées supposant une analyse différente.

 

9.    En se déterminant ainsi, sans rechercher, même d’office, si ces demandes ne constituaient pas l’accessoire, la conséquence ou le complément de celles formées par M. A en première instance, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.

 


 

En présence de demandes nouvelles, la juridiction d’appel est donc tenue, si elle choisit de les écarter, de vérifier d’abord si elles ne constituent pas l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises à la juridiction du 1er degré.

Les écarter en décidant « qu’elles ne tendent pas aux mêmes fins » contrevient aux dispositions de l’article 566 du CPC qui imposent de vérifier leur caractère accessoire, ou si elles sont la conséquence ou le complément nécessaire des demandes initiales.

Jérôme Wedrychowski a longtemps tenu un blog… Une catégorie particulière lui est donc réservée sur cette page Actualités, pour qu’il vous partage ses lectures (juridiques ou autres…) en ces temps agités et incertains.