La Cour de cassation rappelle dans un arrêt du 13 octobre 2020 que le secret médical a été instauré dans le seul intérêt du patient, afin de garantir la confidentialité des informations qu’il donne à son Médecin.
Dès lors, le préjudice de réputation allégué par un Médecin dont sa secrétaire a violé ce secret pour se défendre dans le cadre d’un litige prud’homal, ne peut qu’être indirect et rend irrecevable l’action intentée par le Médecin.
L’infraction de violation du secret professionnel protège donc seulement le patient dont les informations ont été révélées et non pas le Médecin dont la réputation n’est atteinte qu’indirectement.
Par Jérôme Wedrychowski et Ladislas Wedrychowski
Les faits et la procédure :
Dans le cadre du litige portant sur son licenciement, une Secrétaire médicale avait produit dans le cadre des débats devant le Conseil de Prud’hommes le dossier médical d’un patient, des carnets de rendez-vous et de correspondances.
Les Médecins ont fait citer devant le Tribunal correctionnel leur ancienne secrétaire pour violation du secret professionnel, soutenant que la divulgation de ces documents avait porté atteinte, d’une part à l’intérêt de leur patient, d’autre part à leur réputation.
Les Médecins ont été déclarés irrecevables dans leur action, le préjudice allégué étant jugé comme indirect.
Le pourvoi formé :
Devant la Cour de cassation, les plaignants soutenaient qu’un médecin, dépositaire du secret médical, doit, quel que soit son mode d’exercice, personnellement veiller à ce que les personnes qui l’assistent soient instruites de leurs obligations en matière de secret professionnel et s’y conforment strictement.
Par ailleurs, ils soutenaient que la violation de ce secret par une assistante salariée portait atteinte, auprès des patients, à la réputation du Cabinet médical, comme à celle des médecins que cette dernière assistait.
Il en résultait donc un préjudice direct et personnel qui rendait leur action recevable.
La position de la Cour de cassation :
La Cour de cassation énonce tout d’abord les règles applicables :
Elle rappelle tout d’abord au visa de l’article 2 du Code de procédure pénale que l’action civile appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction.
Elle rappelle ensuite que l’infraction d’atteinte au secret professionnel prévue à l’article 226-13 du code pénal est destinée à protéger la sécurité des confidences qu’un particulier est dans la nécessité de faire à une personne dont l’état ou la profession, dans un intérêt général et d’ordre public, fait d’elle un confident nécessaire.
Sur ces bases la Cour de cassation considère que la violation du secret professionnel ne porte directement préjudice qu’à l’intérêt général et à l’auteur de ces confidences.
Dès lors, la Cour de cassation rejette l’argumentation et donne raison aux juridictions du 1er degré.
Pour déclarer les plaignants irrecevables en leur action, la Cour d’appel retient que l’article R.4217-4 du Code de la santé publique que le secret médical a été institué dans l’intérêt du patient et non pas dans celui du médecin.
Les juges en déduisent que l’employeur, victime indirecte d’une violation du secret professionnel par son salarié, n’est pas habilité à mettre en mouvement l’action publique en application de l’article 2 du code de procédure pénale.
La Cour de cassation valide cette analyse dans les termes suivants :
13. En effet, d’une part, il résulte de l’article L.1110-4 du Code de la santé publique que toute personne prise en charge par un professionnel participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant.
14. Il s’ensuit que le secret médical étant un droit propre au patient, son médecin n’est pas recevable à se constituer partie civile du chef de violation du secret professionnel, dans l’intérêt de celui-ci.
15. D’autre part, ne peut être qu’indirect, pour un médecin ou la société dans le cadre de laquelle il exerce ses fonctions, le préjudice résultant de l’atteinte que porterait à sa réputation la violation du secret professionnel par une salariée de cette société.
Pour lire l’arrêt publié sur le site de la Cour de cassation : cliquez ici.